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07/2021
Anna Savio Anna Savio
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Déprime ou dépression? Repérer les différences

Déprime ou dépres­sion : repér­er les différences

Il est assez com­mun de se dire déprimé, ou de dire de quelqu’un qu’il a un coup de déprime. Par ailleurs, on entend beau­coup par­ler de la dépres­sion comme d’un mal qui se répand selon des pro­por­tions inquié­tantes dans nos sociétés con­tem­po­raines. La dis­tinc­tion n’est pas tou­jours claire et pour­tant ces deux ter­mes désig­nent des réal­ités bien dif­férentes. D’un côté on par­le d’un proces­sus nor­mal dans toute vie psy­chique et même d’une capac­ité pré­cieuse per­me­t­tant de réguler notre activ­ité interne. De l’autre, il est ques­tion d’une véri­ta­ble mal­adie qui déte­ri­ore en pro­fondeur le fonc­tion­nement psy­chique et qui présente des risques sérieux sur le long terme. On ver­ra que les signes de la déprime et de la dépres­sion se ressem­blent et se recoupent pour­tant jusqu’à un cer­tain point. Si la déprime est un état tran­si­toire de mal-être qui per­met de gér­er émo­tion­nelle­ment des dif­fi­cultés ponctuelles et qui se résout en général rapi­de­ment et favor­able­ment, elle peut cepen­dant aus­si évoluer en dépres­sion si les dif­fi­cultés con­crètes ou la charge émo­tion­nelle dépassent les capac­ités d’in­té­gra­tion de la per­son­ne. On peut donc par­ler d’ « état dépres­sif » pour désign­er un ensem­ble de signes ou de symp­tômes qui à un moment don­né évo­quent la déprime et/ou la dépres­sion sans que l’on puisse se posi­tion­ner fer­me­ment sur la nature de cet état. Alors déprime ou dépres­sion ? Vous trou­verez ici des clés pour mieux com­pren­dre ce qui les dif­féren­cie, ain­si que des élé­ments con­crets pour appren­dre à les iden­ti­fi­er et à mieux vous protéger.

La déprime, un proces­sus normal 

La déprime est l’ex­pres­sion de ce qu’on peut appel­er la « dépres­siv­ité », à savoir la capac­ité à tra­vers­er les épreuves dif­fi­ciles pour soi, qu’elles soient mineures ou majeures, sans s’ef­fon­dr­er com­plète­ment. Ain­si, « les vari­a­tions d’humeur, les sen­sa­tions de tristesse, de vide, de « coup de blues » appar­ti­en­nent à la capac­ité dépres­sive nor­male de l’hu­main ». Il s’ag­it en somme d’un mécan­isme de ges­tion des dif­fi­cultés psy­chiques : celles ci vont surtout s’ex­primer par la régu­la­tion de l’humeur, qui va baiss­er. On peut pren­dre l’im­age de la cocotte-minute et con­sid­ér­er que la dépres­siv­ité est l’une des soupa­pes de sécu­rité du psy­chisme. Elle per­met de laiss­er s’échap­per la pres­sion afin que l’équili­bre se rétab­lisse. Il est donc naturel au cours de notre vie de pass­er par des moments de déprime, et c’est même le signe d’un psy­chisme sain : cer­taines per­son­nal­ités sont trop frag­iles pour être même en mesure d’éprou­ver émo­tion­nelle­ment leurs dif­fi­cultés. Aux sources de la déprime, on trou­ve sou­vent un ou des événe­ments spé­ci­fiques. Il se peut que vous viviez dif­férentes expérences dif­fi­ciles sans fail­lir, en « ten­ant le coup », et qu’un élé­ment mineur vous désta­bilise et vous con­duise à la déprime. Dans ce cas, il s’ag­it d’une fatigue psy­chique, votre sys­tème ne peut plus con­tin­uer à fonc­tion­ner comme à son habi­tude, vous n’êtes plus en mesure de tenir, de faire comme si tout allait bien et cela se man­i­feste con­crète­ment via le coup de déprime. La grav­ité objec­tive de l’événe­ment n’est pas non plus à met­tre en lien avec la man­i­fes­ta­tion de la déprime ; le psy­chisme ren­voie à un ensem­ble de mécan­ismes com­plex­es per­me­t­tant de gér­er les stim­u­la­tions psy­chiques de tout ordre, et dans le cadre de ce proces­sus demande par­fois à « décom­press­er » et se relâch­er d’une ten­sion ordi­naire. La déprime est donc un mau­vais moment à pass­er. Elle se car­ac­térise par une baisse de l’humeur, avec un sen­ti­ment de tristesse et de vide. Elle est sou­vent accom­pa­g­née d’anx­iété, par­fois d’ir­ri­tabil­ité et fréquem­ment de trou­bles du som­meil (insom­nies ou à l’in­verse besoin de som­meil plus impor­tant qu’habituelle­ment). Ces symp­tômes sont com­muns à la déprime et à la dépres­sion, même si dans ce dernier cas ils sont plus mas­sifs ; on pour­rait donc avoir ten­dance à con­sid­ér­er la déprime comme une dépres­sion légère. Plusieurs choses les dis­tinguent pour­tant, au delà de l’in­ten­sité. D’abord, la ques­tion de la fonc­tion : dans un cas il s’ag­it d’une décom­pres­sion momen­tanée des­tinée à main­tenir l’équili­bre du sys­tème psy­chique, dans l’autre il s’ag­it d’une véri­ta­ble décom­pen­sa­tion, au sens où le sys­tème trop éprou­vé lâche véri­ta­ble­ment sans pou­voir revenir de lui-même à la nor­male. Ensuite, la déprime dis­paraît rapi­de­ment et naturelle­ment. Les symp­tômes ne se main­ti­en­nent pas sur la durée, la per­son­ne retrou­ve assez vite son mode de fonc­tion­nement habituel. A l’in­verse, la dépres­sion est une atteinte pro­fonde du fonc­tion­nement qui s’in­stalle durable­ment. Enfin, ce qui per­me­t­tra plus con­crète­ment de car­ac­téris­er un état dépres­sif comme étant une sim­ple déprime ou une dépres­sion, c’est l’é­ten­due des symp­tômes. Comme on va le voir, la plu­part des capac­ités et des apti­tudes sont préservées dans le cas de la déprime alors que la dépres­sion va venir détéri­or­er tous les secteurs de la personnalité.

Les symp­tômes de la dépression 

La dernière ver­sion du manuel diag­nos­tique et sta­tis­tique des trou­bles men­taux (DSM 5), qui réper­to­rie les critères per­me­t­tant d’i­den­ti­fi­er les dif­férents trou­bles psy­chiques, définit la dépres­sion sous l’in­ti­t­ulé d’ « épisode dépres­sif car­ac­térisé » et iden­ti­fie 9 symp­tômes pro­pres à la dépres­sion. La sévérité de l’épisode va vari­er (léger, moyen ou sévère) en fonc­tion du nom­bre de symp­tômes présents et de leur inten­sité ; celle-ci doit être éval­uée par un pro­fes­sion­nel de san­té ou par un psy­cho­logue. Pour établir le diag­nos­tic de dépres­sion, les symp­tômes suiv­ants doivent avoir été présents pen­dant au moins deux semaines et être ressen­tis par la per­son­ne la majorité du temps : l’humeur dépres­sive (sen­ti­ment de tristesse ou de vide), la perte d’in­térêt ou de plaisir pour les activ­ités habituelle­ment pra­tiquées et appré­ciées, les change­ments d’habi­tudes ali­men­taires (et notam­ment perte ou gain de poids sig­ni­fi­cat­ifs), les trou­bles du som­meil (insom­nie ou besoin de som­meil plus impor­tant qu’habituelle­ment), l’ag­i­ta­tion ou le ralen­tisse­ment psy­chomo­teur dans les activ­ités quo­ti­di­ennes, une fatigue omniprésente (perte d’én­ergie), un sen­ti­ment de déval­ori­sa­tion ou de cul­pa­bil­ité, des trou­bles cog­ni­tifs (dif­fi­cultés de con­cen­tra­tion, indé­ci­sion), et enfin des idées sui­cidaires. Pour établir un diag­nos­tic de dépres­sion (ou épisode dépres­sif car­ac­térisé), il faut que la per­son­ne présente au moins 5 de ces symp­tômes, com­prenant néces­saire­ment soit l’humeur dépres­sive, soit la perte d’in­térêt et de plaisir. On voit bien ici que la dépres­sion est sus­cep­ti­ble de touch­er les domaines les plus var­iés de la per­son­nal­ité, qu’ils soient affec­tifs, com­porte­men­taux ou cog­ni­tifs : on est avec la dépres­sion sur une atteinte globlale du fonc­tion­nement de la per­son­ne, qui ne se recon­naît plus, ce qui aug­mente la douleur morale et le sen­ti­ment de perte de con­trôle. Le DSM iden­ti­fie plusieurs formes de dépres­sion en fonc­tion de la pré­dom­i­nance de cer­tains symp­tômes et du pro­fil psy­chique de la per­son­ne, et nous pou­vons en retenir que (presque) tout le monde est sus­cep­ti­ble d’être touché. S’il y a des struc­tura­tions de per­son­nal­ité qui y sont moins sujettes que les autres, la dépres­sion est le mode de décom­pen­sa­tion psy­chique le plus courant. Elle est aus­si por­teuse de risques impor­tants, puisque 30 à 50 % des ten­ta­tives de sui­cide en France survi­en­nent dans le cadre d’une dépres­sion. Sou­vent mal com­prise par l’en­tourage qui peut y voir l’ef­fet d’un manque de volon­té ou de moti­va­tion, elle est sociale­ment stig­ma­ti­sante. L’es­time de soi étant atteinte, les per­son­nes souf­frant de dépres­sion ont ten­dance à se reprocher leur état, ce qui ne fait qu’al­i­menter un cer­cle vicieux de cul­pa­bil­ité et de d’au­to-dépré­ci­a­tion. On retrou­ve ici la ques­tion de l’é­ten­due des symp­tômes, qui dis­tingue déprime et dépres­sion : dans le pre­mier cas la baisse de moral s’ac­com­pa­gne de per­tur­ba­tions de sur­face qui touchent à l’ac­tiv­ité quo­ti­di­enne (som­meil, irri­tabil­ité) alors que la dépres­sion vient déte­ri­or­i­er les mécan­ismes fonta­men­taux du fonc­tion­nement psy­chique (estime de soi, cog­ni­tion). Une tran­si­tion pro­gres­sive de la déprime vers la dépres­sion est pos­si­ble : elle sig­ni­fie que nos capac­ités de résilience, c’est à dire la pos­si­bil­ité de sur­mon­ter une épreuve en retrou­vant son équili­bre psy­chique, sont épuisées. Dans ce cas, la déprime ne suf­fit plus en tant que mécan­isme nor­mal de régu­la­tion du fonc­tion­nement psy­chique, l’é­tat dépres­sif s’ag­grave et l’on « tombe » en dépression.

Les caus­es de la dépression 

Elles sont nom­breuses et la dépres­sion résulte sou­vent d’une com­bi­nai­son com­plexe de fac­teurs psy­chologiques, géné­tiques et envi­ron­nemen­taux. On peut not­er que la dépres­sion touche deux fois plus les femmes que les hommes et que l’hérédité est un fac­teur de risque : les per­son­nes ayant une his­toire famil­iale dans laque­lle on retrou­ve des trou­bles de l’humeur présen­teront une sen­si­bil­ité plus mar­quée à la dépres­sion avec davan­tage de risques de dévelop­per la mal­adie. Les trou­bles de l’humeur ren­voient en effet à une caté­gorie de trou­bles com­prenant la dépres­sion (trou­ble unipo­laire) et les trou­bles bipo­laires. Les événe­ments de vie stres­sants et/ou douloureux (prob­lèmes pro­fes­sion­nels, famil­i­aux, soci­aux, deuil…) font aus­si par­tie des caus­es de la dépres­sion, par­ti­c­ulière­ment lorsqu’ils s’ac­cu­mu­lent jusqu’à épuis­er nos ressources psy­chiques. Enfin les per­son­nes diag­nos­tiquées avec un trou­ble de la per­son­nal­ité sont aus­si plus sujettes que les autres à la dépres­sion. Le trou­ble de la per­son­nal­ité cor­re­spond en effet à un mode d’or­gan­i­sa­tion pathologique de la per­son­nal­ité per­me­t­tant de lut­ter con­tre dif­férentes formes de souf­france psy­chique (per­son­nal­ités para­noïaque, schizoïde, schizo­typ­ique, anti­so­ciale, bor­de­line, histri­on­ique, nar­cis­sique, évi­tante, dépen­dante ou obses­sion­nelle-com­pul­sive) : les per­son­nes qui en sont por­teuses sont donc générale­ment plus frag­iles et/ou insta­bles du point de vue psy­chique et de ce fait plus sus­cep­ti­bles de décom­penser, ou de s’ef­fon­dr­er psy­chique­ment, à tra­vers la dépres­sion. Tous les trou­bles de la per­son­nal­ité ne sont cepen­dant pas touchés de la même manière : les trou­bles de la per­son­nal­ité histri­on­ique et bor­der­line (mar­qués par une émo­tiv­ité et une sen­si­bil­ité impor­tantes) ont été repérés comme étant ceux qui con­nais­sent le plus d’épisodes dépres­sifs. De manière plus générale, notre per­son­nal­ité, résul­tat de notre con­struc­tion psy­chique, peut présen­ter une prédis­po­si­tion à la dépres­sion. Freud con­sid­érait que la per­son­nal­ité peut être représen­tée comme un cristal com­por­tant virtuelle­ment des lignes de frac­ture spé­ci­fiques : si ce cristal devait se bris­er, il ne pour­rait le faire qu’en suiv­ant les lignes de failles inscrites dans sa struc­ture. En somme, pour un trau­ma­tisme psy­chique com­pa­ra­ble, la décom­pen­sa­tion ou l’ef­fon­drement ne se man­i­fes­teront pas sous la même forme selon notre organ­i­sa­tion psy­chique, nos modes de fonc­tion­nement et notre per­son­nal­ité. Berg­eret expli­quait ain­si que les per­son­nal­ités de type « lim­ite » étaient, de par leur nature, plus sujettes aux dépres­sions sévères que les per­son­nes struc­turées selon le mode névro­tique ou psy­cho­tique. Selon lui, ce sont les blessures nar­cis­siques, car­ac­téris­tiques des per­son­nes dites « états-lim­ites » (ou bor­der­line), qui nous ren­dent le plus sen­si­ble à la dépres­sion. En effet la dépres­sion est tra­di­tion­nelle­ment con­sid­érée comme une souf­france liée à la « perte de l’ob­jet » d’amour et à l’a­ban­don. Si nous nous sen­tons incom­plet dû à des failles au niveau de l’amour de soi, ou du nar­cis­sisme (le plus sou­vent liées à des blessures d’en­fance), nous aurons ten­dance à nous con­stru­ire en appui sur dif­férentes béquilles affec­tives comme nos rela­tions aux autres, l’in­vestisse­ment de la vie pro­fes­sion­nelle ou les com­porte­ments addic­tifs (plus de détails con­cer­nant cette ques­tion sur ce blog dans l’ar­ti­cle Dépen­dance affec­tive : com­ment devenir émo­tion­nelle­ment sta­ble ?). Or ce mode de fonc­tion­nement est par­ti­c­ulière­ment investi par les per­son­nal­ités dites « lim­ites ». Il peut suf­fire qu’une de ces béquilles cède (rup­ture, deuil, tran­si­tion pro­fes­sion­nelle…) pour que nous dévelop­pi­ons une dépres­sion. Abra­ham affir­mait d’ailleurs que les sujets prédis­posés à la mélan­col­ie (car­ac­téris­tique de la dépres­sion sévère) étaient plus sou­vent por­teurs de traits de per­son­nal­ité obses­sion­nels et asso­ciés à la dépen­dance affec­tive. En somme, si la dépres­sion est un mode de décom­pen­sa­tion psy­chique très courant sus­cep­ti­ble de touch­er un grand nom­bre de per­son­nes, il existe un ter­rain per­son­nel (géné­tique et psy­chologique) qui nous expose plus ou moins au risque dépres­sif, indépen­dam­ment des fac­teurs environnementaux.

Pour se pro­téger et pour s’en sortir 

Soyez vigilant(e) et observez les signes. Si vous sen­tez que votre déprime s’in­stalle au delà de quelques jours, il faut réa­gir vite et con­sul­ter un pro­fes­sion­nel de san­té et/ou un psy­cho­logue. Un médecin général­iste sera dans un pre­mier temps en mesure de repér­er le risque, de vous con­seiller et de vous ori­en­ter vers une per­son­ne ressource. L’ac­com­pa­g­ne­ment thérapeu­tique suf­fit par­fois à sur­mon­ter un état dépres­sif mineur. En cas de dépres­sion avérée, des anti­dé­presseurs peu­vent être pre­scrits et mon­trent générale­ment de très bons résul­tats ; il est impor­tant cepen­dant de les com­bin­er à un suivi psy­chothérapeu­tique auprès d’un psy­chi­a­tre for­mé à la psy­chothérapie ou d’un psy­cho­logue. Si vous êtes actuelle­ment en dépres­sion, vous ne devez pas rester seul(e). Les ser­vices hos­pi­tal­iers d’ur­gences peu­vent être une ressource si vous sen­tez que vous allez mal. N’ou­bliez pas que vos per­cep­tions de vous-même (mau­vaise estime de soi) et vos dif­fi­cultés (fatigue, inca­pac­ité à réalis­er cer­taines tâch­es ou activ­ités, trou­bles cog­ni­tifs…) sont entière­ment dûs à la mal­adie. Asso­ciée à des anti­dé­presseurs, une thérapie peut notam­ment vous aider à remet­tre en ques­tion vos per­cep­tions et à observ­er les biais et les erreurs de juge­ment qui vous enfer­ment dans le cer­cle vicieux de l’au­to-dépré­ci­a­tion. Il peut aus­si s’a­gir de pren­dre enfin le temps de vous arrêter sur vous-même afin d’être en mesure d’i­den­ti­fi­er vos blessures passées et de tra­vailler à les soign­er, tou­jours avec l’aide d’un thérapeute. Dans tous les cas, vous ne devez pas oubli­er que votre état n’est que pas­sager : avec un accom­pa­g­ne­ment adap­té, vous retrou­verez bien­tôt un mode de fonc­tion­nement nor­mal, et surtout le plaisir de vivre. La dépres­sion n’est pas une fatal­ité, mais bien une mal­adie qui se soigne et se guérit. Enfin, plus vite vous serez pris en charge, plus vous évitez les éventuels risques de rechute et de chroni­ci­sa­tion du trou­ble. N’at­ten­dez pas pour pren­dre soin de vous. 

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